Association Médiévale Romande - Valorisation du patrimoine médiéval suisse romand

Entretien avec le président de la Fédération Suisse des Arts Martiaux Historiques Européens (FSAMHE)

La FSAMHE a été créée en octobre 2012 pour promouvoir la pratique et l’étude des AMHE en Suisse, organiser un événement annuel, soutenir les groupes dans leur pratique et dans la communication, discuter sur la sécurité et prévenir les blessures.

L’Association Médiévale Romande a proposé en 2013 un petit questionnaire à Daniel Jaquet, président fondateur de la FSAMHE. Nous le remercions chaleureusement pour ses réponses et vous invitons à prendre contact avec la fédération pour tout intérêt lié aux AMHE.

Comment vous est venue l’idée de créer une fédération ?

A l’heure actuelle plus de 8 pays européens se sont dotés d’une fédération liée à la pratique des AMHE (information sur notre site Internet). Nous nous inscrivons dans cet élan international, dynamisé lors des rencontres internationales annuelles (Dijon, Swordfish, Fightcamp et Dreynevent). L’idée a germé il y a quelques années lors de mes discussions avec Dieter Bachmann (Freywild), un autre instructeur membre de l’HEMAC présent sur la scène internationale.

Avez-vous reçu un soutien particulier lors de sa création ?

L’idée a tout de suite séduit les différentes associations contactées, un groupe de travail s’est mis sur pied au début de l’année 2012 et nous nous sommes constitués en octobre de la même année.

Avez-vous rencontré des difficultés pour fédérer les clubs (longues discussions, problème de langue, refus) ?

Nous avons décidé d’opter pour la solution facile, c’est-à-dire réunir les groupes qui avaient émis préalablement un avis positif et qui se rencontraient d’ailleurs déjà par le passé, ce qui a certainement facilité les choses. L’autre option aurait été de tenter de convoquer tous les groupes se réclamant d’une approche AMHE pour discuter, mais nous avons préféré la première option. Elle laissera le temps à la fédération de faire ses preuves et de grandir, de manière à convaincre les autres groupes de la rejoindre s’ils estiment qu’ils en partagent les intérêts.

D’un point de vue géographique et quantitatif, exprimez-vous sur la localisation des clubs en Suisse romande.

Comparé à la partie suisse-allemande, les groupes sont plus nombreux et plus grands dans notre partie occidentale pour le moment. Vous trouverez une liste des associations/groupes affiliés sur notre site Internet. Nous avons déjà reçu plusieurs demandes d’adhésion récemment, mais il faudra attendre novembre et l’assemblée générale pour qu’elle statue sur ces demandes d’adhésion.

En ce qui concerne les régions dépourvues de club à proximité, quelles seraient vos indications pour des pratiquants autodidactes ?

La fédération souhaite soutenir la création d’associations (publication de conseils, aide juridique, publication de lignes directrices pour le matériel et la prévention des blessures). Une commission travaillant avec cet objectif sera mise sur pied lors de la prochaine assemblée générale. Une autre travaillera également pour réfléchir à des parcours de formation ou de coaching pour soutenir les « autodidactes » pour reprendre vos termes.

Pensez-vous qu’il peut y avoir des collaborations avec des clubs d’escrime sportive, ou leur fédération (FSE — Fédération Suisse d’Escrime)? Si oui, de quel genre ?

C’est une question relativement sensible et je ne peux pas engager la fédération dans l’expression de mon avis. Toutefois, la majorité des autres fédérations nationales n’ont pas envisagé cette possibilité, car la majeure partie des fédérations nationales d’escrime sportive n’offre pas un cadre idéal pour la pratique des AMHE. Cette situation doit être évaluée pour chaque pays et sera peut-être amenée à changer dans les prochaines années.

Décrivez-nous l’évolution et l’avenir du matériel pour la pratique des AMHE (notamment les protections utilisées depuis les débuts jusqu’à maintenant).

Lorsque j’ai rejoint la communauté en 2005, nous nous entraînions avec des simulateurs «fabriqués maison » avec du scotch. Cela s’est beaucoup développé ces dernières années. Sous l’impulsion de groupes influents et des fédérations, des fabricants de matériel d’escrime sportive ont développé des lignes de produits destinées à nos pratiques (Allstar, PBT, répertoriés sur notre site Internet). D’autres fabricants amateurs ou semi-professionnels se professionnalisent. Toutefois, notre communauté n’est pas suffisamment importante et les différentes fédérations n’ont pas suffisamment d’années d’existence pour proposer une standardisation du matériel. Les organisateurs d’événements internationaux sont ceux qui fixent actuellement les standards ou tout du moins, l’équipement minimal, le reste pour l’instant est l’affaire de chacun des groupes.

Pourriez-vous nous donner des exemples d’accidents qui ont été causés par des pratiquants mal équipés ?

J’ai été témoin de plusieurs accidents et je suis également les actualités de la communauté via les forums spécialisés qui tentent depuis peu de recenser ce type d’accidents. Il y a malheureusement des accidents à déplorer, rarement critiques, mais une grande majorité ne sont pas spécifiquement dus au matériel, plutôt au manque de politique de prévention des blessures ou à des activités mal ou pas encadrées. Disposer de matériel de qualité est une nécessité, la disponibilité d’un tel matériel s’améliore d’année en année et les fédérations doivent statuer sur cette question, mais surtout établir des lignes directrices pour la prévention des blessures.

Au niveau juridique, comment faut-il transporter son matériel, notamment les armes ?

Pareil qu’une hache qu’on achète dans un magasin d’outillage. Si l’outil est transporté dans des espaces publics (comme le bus par exemple), il faut le transporter dans un contenant fermé dans l’idéal (sac en tissu ou en dur ne permettant pas de sortir immédiatement l’outil), mais au minimum avec une protection recouvrant les parties dangereuses (pointe, tranchant). Aux yeux de la loi, nos simulateurs ne sont pas à considérer comme des armes. En tant que pratiquants, nous n’avons donc pas la nécessité d’établir un permis de port ou d’acquisition. Paradoxalement, c’est pareil pour les armes aiguisées: aux yeux de la loi, seules les armes courtes à double tranchant font l’objet d’une législation spécifique.

Que dit la loi suisse quant à la pratique d’AMHE en lieux publics (parcs, plages, forêts) ?

Tant qu’il n’y a pas mise en danger d’un tiers de manière intentionnelle ou par négligence, rien ne nous interdit d’utiliser les lieux publics pour nous entraîner. Il s’agit avant tout de bon sens et d’un minimum d’esprit civique. Si des pratiquants devaient décider de s’entraîner dans un lieu public fréquenté, il est alors nécessaire de réfléchir à la cohabitation avec les autres usagers de l’espace, ainsi qu’à la nécessité de mener cette activité dans ce lieu.

Question ouverte : La rencontre de St-Cergue s’inscrit comme premier événement sous l’égide de la FSAMHE. Comment s’est-elle déroulée et quels points retenez-vous avec du recul ?

Le « premier » événement est le Swiss Gathering qui est également l’assemblée générale de la fédération. Toutefois, dès qu’un groupe ou une association souhaite organiser un événement de portée nationale ou internationale, la fédération souhaite collaborer au minimum au niveau de la promotion et de la communication de l’événement. C’est ce qui est entendu par la mention « sous l’égide de la fédération ». L’événement de St-Cergue s’est bien déroulé. L’association GaGschola organise des stages d’une journée avec des instructeurs de niveau international depuis 2009, c’était notre premier événement sur deux jours, nous avons commis des impairs (communication, établissement du budget, etc.), mais c’est le lot des démarches associatives. Nous apprenons de nos erreurs et nous souhaitons présenter une version améliorée pour 2014. Nous sommes heureux d’avoir su attirer quelques membres suisse-allemands: une des volontés de la fédération est de sauter à pieds joints par-dessus le röstigraben. Venez nombreux et réservez déjà la date du 18 au 19 janvier prochain [ndrl : janvier 2014] !

Démonstration d'AMHE, Saint-Ursanne 2011

Démonstration d’AMHE, Saint-Ursanne 2011